Thomas Hug de Larauze, réalisateur de Promesse, répond aux questions des Nouveaux Activistes

Le 25 juin prochain, venez assister à la projection du documentaire Promesse au cinéma l'Arbore à Rennes.

En attendant cette soirée mémorable, nous vous proposons de faire connaissance un peu plus avec le réalisateur, Thomas Hug de Larauze

Les Nouveaux Activistes : Promesse débute avec une promesse fraternelle. À quel moment cette promesse s’est-elle transformée en chemin de reconstruction familiale ?

Thomas Hug de Larauze : Je n’ai pas la prétention de dire que c’était un chemin de reconstruction à proprement parler, mais ce projet nous a fait cheminer, chacun à notre manière, mes parents, mes frères et sœurs, moi. La découverte des vidéos de Laurène a été un déclencheur, qui m’a donné envie d’aller interviewer ma famille sur leur ressenti. Ces vidéos de Laurène et ces échanges avec ma famille sont les moments les plus marquants du projet.  On s’est dit des choses qu’on ne se dit jamais au quotidien. Ça nous a fait du bien, à tous.
Depuis la sortie du film, il y a eu un véritable engouement dans la famille. Ils sont tous à fond derrière le projet. Laurène continue de nous irriguer, de nous porter avec sa soif de vie. Certains m’ont même confié qu’ils vivaient différemment leur relation à Laurène depuis le film. Ils sont un véritable soutien dans la diffusion du film et de ses messages.

LNA : Le film donne la parole à plusieurs membres de ta famille. Qu’est-ce que cela a changé dans ta relation avec chacun d’eux ?

THDL : Je leur ai posé des questions très simples, très directes : comment ils avaient ressenti tel ou tel moment de notre histoire. Ils m’ont livré leurs réponses sans mise en scène, sans narration préfabriquée. Ils se sont purement et simplement livrés. Et ça a été très fort, pour eux comme pour moi.
J’ai découvert des choses sur ma famille à travers ce film. Des choses que je n’aurais sans doute jamais sues autrement car nous n’en aurions jamais parlé spontanément.

LNA : Tu as transformé un deuil intime en un projet collectif. Qu’est-ce que cela a changé dans ta manière de vivre la mémoire de ta sœur ?

THDL : Ce projet, j’en avais besoin. C’était vital. Il m’a permis de faire évoluer ma relation avec Laurène. J’avais cette impression qu’elle voyait que j’avançais de là où elle est.
Je me suis aussi mis une forme de pression : je voulais être fidèle à ce qu’elle aurait voulu faire. Et pour lui rendre hommage, je ne voulais pas seulement parler d’elle, mais aussi du ressenti de chacun.
J’ai construit une frise chronologique avec tous les moments-clés de sa vie. Parfois, j’avais des pulsions frénétiques d’y retourner, j’avais peur d’oublier. Ces vidéos m’ont rassuré, elles m’ont permis d’avancer.
Ce qui m’a surpris, c’est de prendre conscience, au fil du montage, de la manière dont j’avais moi-même vécu sa maladie. Ce n’était pas facile, mais avec le recul, je suis reconnaissant d’avoir pu traverser ça ainsi.
Et plus le projet avançait, plus ma famille réalisait ce que ce film allait représenter. Leur investissement est devenu encore plus fort. C’est un vrai cadeau qu’ils m’ont fait, et qu’on a fait, tous ensemble, à Laurène.

LNA : Quels sont les moments-clés qui t’ont permis d’avancer dans la réalisation de ce film ?

THDL : Laurène est décédée en 2016. Il m’a fallu deux ans pour accepter l’idée même de faire ce film. Puis j’ai fait une pause professionnelle en 2018, pendant un an. Je réalisais à quel point ça allait être long et difficile, et on m’a fait comprendre que le processus allait durer plus longtemps.
J’ai rencontré une trentaine de personnes du milieu du cinéma. Une d’entre elles m’a aidé à structurer l’écriture. Je n’avais pas de producteur au départ. Puis j’ai rencontré Clarisse Tupin, qui est devenue productrice. Elle m’a aidé à trouver des contacts, des financements, des partenaires.
Le tournage a duré un an. Puis, j’ai consacré une semaine tous les mois et demi environ au projet, j’avais repris une activité professionnelle. Le montage a pris trois mois et demi. Et, après avoir échangé avec ma famille,  je suis même revenu dessus ensuite, pour affiner, pour que le film ressemble encore plus à Laurène.
On a trouvé un distributeur à la fin du projet, ce qui est assez rare. Et le film est sorti en salles le 23 avril.

LNA : Promesse ne parle pas seulement de la maladie. Il est question d’amour fraternel, d’espoir, de liens. Quel message espères-tu que les spectateurs emportent avec eux ?

THDL : Ce n’est pas un film sur la maladie. C’est un film sur la vie. À l’image de Laurène. Il parle de la beauté et de la fragilité de la vie, de la libération de la parole sur des sujets sensibles, voire tabous. Il parle surtout d’espoir. Ce sont des thèmes universels, même pour ceux qui n’ont pas vécu la maladie ou le deuil. Beaucoup de spectateurs me disent « merci » en sortant. Ça veut dire que quelque chose a touché juste.

LNA : Quelles rencontres, à travers ce film ou ses projections, t’ont particulièrement marqué ?

TDHL : Il y en a eu beaucoup. Comme le film évoque plusieurs causes, de nombreuses associations sont impliquées. J’ai découvert tout un pan du milieu associatif, notamment les associations de parents en deuil.
C’est impressionnant de voir à quel point ces personnes se mobilisent, souvent avec très peu de moyens. Et on sent que l’État s’appuie beaucoup sur elles.
J’ai rencontré des familles endeuillées, avec des parcours très lourds. Leur histoire résonne avec la mienne. C’est toujours très émouvant, parfois difficile, mais il y a une compréhension immédiate, une reconnaissance mutuelle dans la fragilité de la vie.
Et puis, des gens du cinéma m’ont épaulé. C’est une chance d’avoir été entouré comme ça.

LNA : Le film évoque aussi ce que les proches vivent dans l’ombre de la maladie. Que souhaiterais-tu dire aux familles qui accompagnent un être cher malade ?

TDHL : Je n’ai aucune prétention à donner des conseils. Mais ce que je peux dire, c’est que libérer la parole, ça fait vraiment du bien.
Beaucoup de gens qui ont accompagné un proche viennent voir le film, et ça fait écho chez eux.
Accepter de dire les choses, de parler de l’absence, de la présence, de ses doutes, et parfois, une oreille attentive, un appel de réconfort, ça change tout.
Et il ne faut pas oublier les accompagnants, on en prend peu soin. Or, ce sont eux, souvent, le premier médicament du malade.

LNA : Tu défends, à travers Promesse, des causes qui étaient chères à Laurène. Peux-tu nous dire lesquelles ?

TDHL : Il y en a quatre principales.

  • Les dons de vie (plasma, plaquettes, sang, moelle osseuse). En France, on est très en retard sur la question de l’inscription sur les registres. Il faut sensibiliser, notamment les jeunes, dans les collèges, les lycées, les universités.
  • L’accompagnement des aidants et des patients en dehors du cadre strictement médical. Tous ceux qui soulagent le quotidien comptent énormément.
  • La recherche : certaines pathologies sont traitées chez l’adulte, mais pas chez l’enfant. Il faut absolument accentuer la recherche pour trouver des traitements adaptés à chaque maladie.
  • L’accompagnement dans le deuil, pour enfin mettre en lumière celles et ceux qui soutiennent les familles.

À chaque projection, on met en avant une association, pour qu’elle puisse recruter des bénévoles ou recevoir du soutien.

LNA : Si tu devais résumer en une phrase ce que Promesse a permis de transmettre, au sein de votre famille et auprès du public, quelle serait-elle ?

TDHL : Promesse, c’est un film sur la vie, l’amour, l’espoir.
C’est un film qui permet de libérer la parole sur des sujets tabous comme la maladie ou le deuil.
Il nous rappelle qu’on n’est pas seuls. Les acteurs de terrain sont formidables, et c’est essentiel de les faire connaître.

Merci beaucoup Thomas pour le temps que tu nous a accordé et pour avoir répondu à nos questions !

Vous souhaitez découvrir Promesse, le 25 juin prochain au cinéma l'Arvor à Rennes ? Prenez vos places dès à présent !